Les violences sexuelles sont un phénomène très répandu, et comme elles engendrent souvent des problèmes de santé, il nous semblait pertinent d’aborder le sujet.
Malgré la difficulté à compter TOUTES les victimes de ces violences, en France, on compte :
– 10 à 20% de victimes de violences sexuelles dans l’enfance (oui oui, ça fait au moins 1 sur 10)
– 53% de femmes ayant vécu des violences sexuelles dans leur vie
Les répercussions des violences sexuelles sur la santé sont nombreuses, et peuvent se manifester de manière plus ou moins insidieuse
Sur le plan psychologique les violences sexuelles peuvent provoquer un état de stress post traumatique, un syndrome anxieux ou dépressif, trouble du sommeil et du comportement alimentaire.
Et sur le plan somatique : des douleurs chroniques, abdominales, gynécologiques et ostéoarticulaires et sur-risque d’endométriose, d’affection auto-immune et cardio-vasculaire.
Ces troubles sont souvent la source d’impasses diagnostic et/ou thérapeutiques dû à la méconnaissance de ces mécanismes.
La prévalence et les répercussions des violences sexuelles en font un problème majeur de santé publique.
En tant que futurs soignant.e.s, nous allons inévitablement être amené.e.s à rencontrer des personnes ayant vécu des violences sexuelles, souvent précisément pour traiter les conséquences de ces dernières. Il nous semble donc essentiel d’apprendre à reconnaître les conséquences des violences sexuelles et à savoir réagir face à celles-ci.
Tout d’abords, comme le veut le fameux dicton : Primum non nocere
Comme on ne sais pas forcément qui a été victime de violences sexuelles, il vaut mieux prévenir les patients avant de les toucher et/ou leur demandez leur CONSENTEMENT en particulier pour des examens des parties génitales et de la poitrine chez les femmes. Une simple question permet d’éviter de faire revivre un traumatisme à son patient.
Ensuite, en ce qui concerne le traitement, les professionnels de santé ont un rôle crucial à jouer : sans parcours de soin, 80 % des victimes de violences sexuelles rencontrent des complications obstétricales.
Pour les médecins généralistes, acteur.ices au centre de la prise en charge :
– Une écoute bienveillante, sans jugement
– Ne pas remettre en cause ou douter de sa parole : ce que nous jugeons personnellement comme grave ou violent ou non ne doit pas entrer en jeux dans notre réponse
– Informer sur les associations et groupes de soutient de victimes de violences sexuelles, et les différentes ressources disponibles
– Proposer suivi psychologique, sans forcer la victime à accepter des soins immédiatement. Vous pouvez réaborder le sujet lors d’une consultation suivante, car chacun.e. avance à son rythme dans sa reconstruction.
– Et surtout ne pas culpabiliser la personnes de ne pas faire ce que vous recommandez.
Pour les gynéco et les sage-femme :
La consultation en gynécologie est l’occasion idéal pour dépister des événements de violences sexuelles, poser la question aux nouvelles patientes peux enclencher leur prise en charge.
Sujet un peu plus difficile à aborder, il arrive que ce soient les professionnels de santé qui soient, intentionnellement ou non, les responsables de violences sexuelles.
Les violences obstétricales et gynécologiques sont médiatisées depuis 2014 en France depuis l’apparition du #payetonuterus où des milliers de femmes ont témoigné de comportements déplacés de la part de soignant.e.s.
La fréquence de ces témoignages laisse penser qu’ils ne s’agit pas de quelques déviances isolé, mais d’un problème systémique. Ces violences peuvent être expliquer par plusieurs facteurs : un manque de formation et de sensibilisation sur le sujet, par manque de temps ou par habitude on oublie de demander le consentement, de prévenir avant un geste qui porte atteinte à l’intimité. De plus, en tant que soignant.e.s, nous avous désexualisé le corps des patient.e.s, notre rapport au corps est modifié et on a souvent du mal a garder en tête que ce n’est pas le cas des patient.e.s.
Mais ces violences sont aussi le fruit d’une culture carabine violente et sexiste qui banalise ces gestes.
On vous parle des VOG parce que ce sont les violences sexuelles les plus documentés mais ces règles s’appliquent aussi bien sûr à la pratique du toucher rectal.
Pourtant il existe quelques règles simple à mettre en place pour éviter de commettre des violences :
– Rechercher le consentement explicite pour chaque acte, ne pas partir du principe que les patient.e.s vont le signaler d’elleux-même si ils ne sont pas à l’aise avec un acte médical, en tant que soignant.e nous sommes en position d’autorité, c’est à nous de s’assurer du consentement de la personne en lui laissant réellement l’espace de dire non
– Expliquer clairement l’intérêt et le processus de l’examen/acte que nous jugeons nécessaires
– Saviez vous que la position gynécologique de référence qu’on nous enseigne en France n’est pas la seule possible ? Les anglo-saxons privilégient une position en décubitus latéral qui est souvent mieux vécue par les patient.e.s
– Certains gestes peuvent être réalisés par les patient.e.s elleux-même, on peut proposer d’insérer sois même un spéculum ou une sonde pour une écho endo-vaginale
Selon une étude de l’ANEPF, plus de 48% des étudiantes en pharmacie subissent du harcèlement sexuel dans leur cursus, et 27% ont subi une agression sexuelle dans ce cadre.
L’ANEMF rapporte que plus de la moitié des internes sont victimes de VSS*
Bref, vous avez compris l’idée, on vous laisse vous renseigner sur les chiffres des autres filières, la situation est préoccupante.
En tant qu’étudiant.e.s en santé, ces chiffres ne nous étonnent pas. Qui d’entre nous n’a pas été témoin ou victime de VSS en stage, en soirée, ou en inté ?
Une VSS, ou violences sexiste et sexuelle, d’après la définition qu’en fait l’OMS, c’est «tout acte sexuel, tentative pour obtenir un acte sexuel, commentaire ou avances de nature sexuelle, ou actes visant à un trafic ou autrement dirigés contre la sexualité d’une personne en utilisant la coercition, commis par une personne indépendamment de sa relation avec la victime, dans tout contexte, y compris, mais sans s’y limiter, le foyer et le travail» C’est donc plus vaste que les violences sexuelles qui y sont incluses.
Les étudiant.e.s en santé et les soignant.e.s ne sont pas isolé.es du reste de la société, selon certains sociologues, nous vivons dans une culture du viol*, culture particulièrement exacerbée en médecine en raison du rapport au corps décomplexé, et du « besoin de décompresser » qui justifie la grande consommation d’alcool qui fait la réputation des soirée d’étudiants en médecine.
La culture du viol est un concept sociologique utilisé pour qualifier un ensemble d’attitudes et de comportements partagés qui minimisent, normalisent voire encouragent le viol et l’excusent. Toutes les remarques et gestes sexistes y participent, et les mécanismes de déni et d’inversion de la culpabilité œuvrent pour faire taire les victimes.
La bonne nouvelle, c’est qu’une culture, ça se déconstruit.
Il faudrait que la prise en charge des patient.e.s victimes de violences devienne obligatoire, intégré au programme, et ce le plus tôt possible, car nous allons être confronté.e.s à ces situation dés nos premiers stages.
En attendant, nous pouvons nous même nous documenter sur le sujet, nous former, se soutenir et s’entraider face à la culture violente et sexiste de la santé.
Recommandations pour aller un peu plus loin et s’autoformer :
Conséquences des violences sexuelles sur la santé des victimes : Conférence du Dr Muriel Salmona
Le documentaire Primum non nocere: sur les complications obstétricales liées aux violences sexuelles
Ep 3 du podcast Le serment d’Augusta: Je rechercherai le consentement activement et à chaque instant
Un podcast à soi (6) : Le gynécologue et la sorcière
Association https://www.memoiretraumatique.org
MOOC réalisé par la FNEK http://www.fnek.fr/sensibilisation-aux-violences-sexistes-et-sexuelles/
Collectif @pourunemeuf_
Compte @stopvogfr
Nos sources
Association stops aux violences sexuelles https://www.stopauxviolencessexuelles.com
Rôle des sage-femmes http://eu-ireland-custom-media-prod.s3.amazonaws.com/France/Download/Journals/LRSF/LRSF.pdf
« Nous dénonçons le climat misogyne, homophobe et raciste qu’instaure la culture carabine au sein des services hospitaliers » (lemonde.fr) : https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/08/nous-denoncons-le-climat-misogyne-homophobe-et-raciste-qu-instaure-la-culture-carabine-au-sein-des-services-hospitaliers_6116623_3232.html